CIBLE: LA SYRIE, L'IRAN, LA RUSSIE, LA CHINE ?
Par Louis Denghien, le 22 août 2011
Las ! La Russie a réaffirmé, vendredi 19 août, par la bouche du porte-parole du ministre russe des Affaires étrangères, son soutien au gouvernement syrien et son opposition à toute condamnation de celui-ci au Conseil de sécurité : « Nous ne partageons pas le point de vue des Etats-Unis et de l’Union européenne à l’égard du président Bachar al-Assad » a déclaré le diplomate russe, qui s’est même payé le luxe de faire la leçon à l’opposition syrienne, l’exhortant « à mener un dialogue avec les autorités et prendre ses distances avec les extrémistes ». On ne saurait mieux dire sur le sujet, et cette « force tranquille » de la diplomatie russe en dit long sur sa juste perception des motivations américaines et sur son analyse des rapports de force à l’intérieur de la Syrie. En d’autres termes, Moscou, qui se sait appuyé dans cette affaire par Pékin, Delhi, Brasilia, Pretoria, Beyrouth et Téhéran, sans parler d’un certain nombre de capitales latino-américaines, n’a pas l’intention de changer son fusil d’épaule et de lâcher Damas.
On sait qu’à défaut de pouvoir obliger le peuple syrien à changer de gouvernement, les Américains et leurs affidés européens et arabes font le forcing, ces derniers jours, pour stigmatiser diplomatiquement et surtout économiquement le pays. Aux exigences de démission de Bachar émanant des Euro-américains, aux rappels d’ambassadeurs arabo-atlantistes (Saoudiens, Qataris, etc), à la publication d’un rapport d’une commission d’enquête de l’ONU concluant à la possibilité d’une action internationale contre Damas pour « crime contre l’humanité », à l’envoi sur place d’une « mission humanitaire » mandatée par le « conseil des droits de l’homme » de l’ONU et aux menaces de saisine de la Cour pénale internationale, se sont ajoutées de nouvelles mesures de rétorsion économique : à Bruxelles, les représentants de 27 gouvernements européens ont décidé de préparer un plan d’embargo sur les importations de pétrole syrien en Europe : selon des sources françaises, 95% des exportations de pétrole syrien vont vers l’Europe, ce qui représenterait un tiers des recettes commerciales du pays ! Et, histoire de ne pas s’arrêter en si bon chemin, les mêmes ont voté – à mains levées ? – la suspension de l’aide de la Banque européenne d’investissement à Damas.
Très clairement, les Européens, ou plutôt les Eurocrates parient sur l’asphyxie économique du pays, pour relancer l’agitation politique. C’est une idée, mais une idée qui n’a jamais marché, ni en Irak, ni en Yougoslavie, pays qui ont été « réduits » par une intervention armée, les boycotts et blocus économiques s’étant révélés inefficaces, bien que douloureux pour les populations.
Il faut aussi rappeler que les principaux clients de la Syrie à l’exportation demeurent ses voisins irakien (30% des exportations en 2009) et libanais (12,21%) ; les partenaires européens qui comptent sont l’Allemagne (8,90% des exportations en 2009) et l’Italie (4,93%). La capacité de nuisance de l’Union européenne est donc, dans ce domaine, réelle mais relativement limitée.
De tout cela il ressort au moins une bonne nouvelle, pour les fédéralistes européens : l’intégration européenne, ça existe, mais c’est une intégration par le bas et l’inféodation à l’empire américain : 27 pays et Obama/Clinton ne voient qu’une seule tête, bien inclinée devant eux !
La Russie soutient – plus que jamais – Bachar et sermonne l’opposition
Décidément fourmillant d’idées pour domestiquer la Syrie – à défaut d’en avoir pour sortir leurs peuples de la crise – les dirigeants européens repartent à l’attaque au Conseil de sécurité de l’ONU, espérant obtenir une résolution imposant des sanctions, telles qu’embargo sur les armes, gel d’avoirs syriens et interdictions de déplacements à l’étranger pour les dirigeants syriens. Une constance dans l’effort qui mériterait d’être « récompensée » !
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